10 questions pour comprendre la CSRD
Applicable depuis le 1er janvier 2024, la CSRD (ou directive sur le rapport durabilité des entreprises) s’impose désormais comme une norme essentielle visant à renforcer et à élargir les obligations de communication d’informations sur la responsabilité sociale, sociétale et environnementale des entreprises.
Partez à la découverte de la CSRD à travers l’interview de Manon Boulanger, responsable des contenus durabilité chez 22EME SIECLE, agence conseil et communication.
10 questions-réponses qui vont à l’essentiel pour mieux comprendre la CSRD.
Temps de lecture : 8 minutes
Pour vous y retrouver :
- Qu’est-ce que la CSRD ?
- Quels sont les objectifs de la CSRD ?
- Quelles entreprises sont concernées par la CSRD ?
- Pourquoi le reporting extra-financier évolue ?
Quels changements pour les entreprises ? - Qu’est-ce que la double matérialité ?
- Comment se lancer dans la CSRD ?
Quelles priorités dans la mise en oeuvre du nouveau reporting ?
Quels outils pour appliquer les directives de la CSRD ? - Quelles informations faudra-t-il publier ?
Quelles sont les informations obligatoires à présenter ? - A quoi doit ressembler le rapport de la durabilité conforme à la CSRD ?
- Quels sont les avantages et les inconvénients potentiels de la CSRD ?
- Comment 22EME SIECLE peut vous aider ?
Qu’est-ce que la CSRD ?
La CSRD est une directive européenne sur le reporting de durabilité. Le but est de rendre les entreprises plus transparentes sur ces questions. Elle va modifier la façon dont les entreprises intègrent le développement durable dans leur stratégie, leur gouvernance et la gestion des risques.
Le point positif ? Elle va uniformiser les rapports de durabilité pour améliorer la qualité et la disponibilité des informations.
Au final, la CSRD c’est rendre les dirigeants plus responsables envers un public aux besoins et attentes variés.
Quels sont les objectifs de la CSRD ?
On pourrait en citer surement plus, mais voici 5 objectifs majeurs à cette nouvelle directive.
- Optimiser la qualité de l’information extra-financière générée par l’entreprise
- Attirer et ré-orienter les financements pour faciliter la transition vers une économie durable
- Intégrer la durabilité dans la gestion des risques par les acteurs financiers
- Promouvoir la transparence et la perspective à long terme dans les activités financières et économiques
- Élargir la portée de l’information pour englober une part significative des acteurs économiques européens
Le cadeau bonus est d’enfin avoir des données de même valeur ! Ce qui va permettre aux parties prenantes de comparer les entreprises en matière d’engagements RSE !
L’information extra-financière est devenue indispensable pour les entreprises, elle joue un rôle central dans l’évaluation, le suivi et la gestion globale de leur performance.
En interne, elle guide la prise de décision stratégique et oriente la conduite opérationnelle.
À l’externe, elle est essentielle pour la communication envers les parties prenantes et la société, contribuant ainsi à renforcer la transparence et la crédibilité de l’entreprise dans son environnement.
Quelles entreprises sont concernées par la CSRD ?
La CSRD va avoir impact sur 50 000 entreprises en Europe, avec une mise en œuvre planifiée selon le calendrier suivant :
- À partir du 1er janvier 2024 (reporting à publier en 2025) : les entreprises soumises à la directive européenne NFRD et publiant déjà une déclaration de performance extra-financière (DPEF). Ce sont les entreprises cotées avec plus de 500 salariés, plus de 50 millions d’euros de chiffre d’affaires et/ou 25 millions de total de bilan.
- À partir du 1er janvier 2025 : toutes les autres grandes entreprises européennes remplissant au moins deux des trois critères suivants : 250 salariés, plus de 50 millions d’euros de chiffre d’affaires et/ou 25 millions de total de bilan seront incluses.
- À partir du 1er janvier 2026 : les PME cotées sur un marché réglementé (à l’exception des micro-entreprises) seront incluses.
- Pour info : les PME auront des normes de reporting simplifiées et pourront différer leurs obligations de deux ans supplémentaires.
- À partir du 1er janvier 2028 : certaines grandes entreprises non-européennes avec un chiffre d’affaires européen supérieur à 150 millions d’euros et une filiale dans l’Union européenne seront incluses.
Finalement, il va y avoir un effet domino. Même les petites entreprises vont devoir adopter une démarche RSE. En tant que prestataires, elles font partie du Scope 3 d’autres entreprises, qui elles vont chercher à réduire leur empreinte carbone sur les différents scopes.
Pourquoi le reporting extra-financier évolue ?
Si le reporting extra-financier évolue c’est pour s’aligner encore un peu plus avec le Pacte vert européen. L’objectif ? Respecter l’Accord de Paris en réduisant les émissions de gaz à effet de serre de 55 % d’ici 2030 et à atteindre la neutralité carbone d’ici 2050 ! Et vous le savez autant que nous, c’est pas gagné…
La CSRD exige des données plus précises, complètes, avec des indicateurs standardisés pour améliorer la qualité et la transparence des informations. A contrario de la NFRD, sa « petite sœur » qui était moins contraignante et entraînait une grande variabilité dans la qualité des informations diffusées.
Quels changements pour les entreprises ?
La CSRD va apporter 3 changements majeurs pour les entreprises : + de transparence, + d’engagement, + de qualité de la donnée.
Je vous propose un zoom rapide sur chacun de ces points :
- La transparence avec laquelle les ODD sont intégrés dans la stratégie de l’entreprise et l’implication des équipes dans la conception, la mise en œuvre et le pilotage de cette stratégie.
- L’engagement et la communication envers les parties prenantes, y compris les investisseurs, concernant la stratégie durable et les performances associées.
- La pertinence et la qualité de la collecte d’informations, notamment grâce aux indicateurs standardisés.
Qu’est-ce que la double matérialité ?
Pour la première fois, les entreprises vont être obligées de réfléchir à la « double matérialité ». Un vrai pas en avant pour la durabilité !
Cette analyse implique la matérialité financière et la matérialité d’impact.
A retenir, ces deux questions pour mieux comprendre :
- Comment les enjeux économiques, sociaux et environnementaux influent sur la pérennité des activités de l’entreprise? C’est la matérialité financière.
- Comment l’activité de l’entreprise affecte les personnes et l’environnement ? C’est la matérialité d’impact.
Comment se lancer dans la CSRD ?
Quelles priorités dans la mise en œuvre du nouveau reporting ?
Mettre en œuvre (ou mettre à jour) l’analyse de double matérialité
C’est le point de départ de ce reporting. Les entreprises vont gagner du temps en mettant à jour leur processus d’évaluation de matérialité. En matière de transparence, les descriptions claires des analyses et des hypothèses de solutions, seront importantes pour les premiers exercices de publication.
Analyser l’écart entre les informations publiées aujourd’hui et les obligations de reporting
L’exercice de priorisation peut être complété par une analyse comparée entre les futures obligations de transparence et les informations déjà publiées par l’entreprise.
Un conseil : faites l’inventaire des données présentes dans :
- la DPEF,
- le rapport climat,
- le document d’enregistrement universel et ses facteurs risques,
- les états financiers,
- le Plan de vigilance…
Établir une feuille de route
Ces étapes peuvent aider les équipes à planifier la manière dont elles vont mettre en œuvre les nouvelles obligations de la CSRD. Il faudra réfléchir à différents processus pour obtenir les données nécessaires qui ne sont pas encore disponibles, collectées, calculées ou fiables dans l’entreprise. La feuille de route aidera également à reconnaître les personnes internes et externes impliquées à chaque étape, dans le cadre de l’organisation transversale qui sera mise en place.
Quels outils pour appliquer les directives de la CSRD ?
Pour répondre aux exigences de la CSRD, je vous propose trois outils accessibles : la stratégie RSE, les critères ESG et le bilan carbone.
Outil 1 : La stratégie RSE
Les entreprises engagées dans la RSE cherchent à équilibrer responsabilité et viabilité économique. Pour renforcer une stratégie RSE, définissez des indicateurs de performance clés, réalisez un audit, élaborez un plan d’action et mobilisez vos collaborateurs. L’implication de chaque service facilite la collecte de données, optimisant ainsi la stratégie RSE.
Outil 2 : Les critères ESG
Les critères ESG évaluent la stratégie RSE en prenant en compte les aspects environnementaux, sociaux et de gouvernance. Ces critères facilitent la collecte de données essentielles au reporting extra-financier et sont un atout pour attirer des investisseurs.
Outil 3 : Le bilan carbone
Cet outil de la comptabilité extra-financière mobilise les équipes dans la stratégie RSE. Différentes méthodes, comme l’internalisation, le recours à un cabinet de conseil spécialisé ou l’utilisation de logiciels automatisés, permettent de réaliser le bilan carbone, chaque option ayant ses avantages en termes de coût, temps et complexité.
Quelles informations faudra-t-il publier ?
Les entreprises vont devoir intégrer dans leur rapport, une compréhension approfondie des impacts environnementaux et sociaux, ainsi que des enjeux influençant leur développement et performance.
Le reporting couvrira les trois thématiques ESG, incluant la gouvernance, la stratégie, la gestion des impacts, des risques, des opportunités, avec des indicateurs et objectifs associés.
C’est ici que l’analyse de double matérialité a son importance.
Parmi les éléments à inclure, on peut imaginer :
- les typologies d’activités, de secteurs ou d’implantations de l’entreprise,
- les étapes dans la chaîne valeur,
- la prise en compte des parties prenantes,
- la probabilité de réalisation des impacts, risques, et opportunités,
- la force des impacts et leurs effets sur les finances…
Les informations supplémentaires sur la gestion des risques liés au changement climatique seront requises. Ça va obliger les entreprises à expliquer comment ces risques peuvent impacter leurs performances et à creuser les réponses à ces défis.
Quelles sont les informations obligatoires à présenter ?
Le rapport de durabilité devra contenir quelques informations obligatoires introduites par la CSRD.
- Une brève description du modèle d’affaires et de la stratégie,
- Des objectifs de durabilité,
- Une temporalité réfléchie,
- Le rôle des organes, des systèmes d’incitation et des politiques,
- Les principaux risques.
Les entreprises pourront se pencher sur d’autres informations pour déterminer leur importance. Aussi, elles devront communiquer sur des données qui ne sont pas couvertes par les normes mais qui sont essentielles sur leur marché.
A quoi doit ressembler le rapport de la durabilité conforme à la CSRD ?
Les données sur la durabilité doivent figurer dans une section distincte du rapport de gestion, clairement identifiée sous le titre « Déclaration relative à la durabilité ».
La déclaration doit suivre une structure en quatre parties, présentées dans l’ordre suivant :
- informations générales,
- informations environnementales,
- informations sociales,
- et informations en matière de gouvernance.
Le rapport de gestion doit être disponible sous forme numérique, utilisant le format ESEF (European Single Electronic Format) pour baliser les informations de durabilité.
Les entreprises assujetties aux exigences en matière d’information sur la durabilité devront rendre leur rapport de gestion accessible gratuitement au public sur leur site internet.
Quels sont les avantages et les inconvénients potentiels de la CSRD ?
Avantage 1 : Transparence / responsabilité
La CSRD joue un rôle crucial en renforçant la transparence et la responsabilité des entreprises. En imposant un reporting plus détaillé sur les aspects ESG, elle incite les entreprises à rendre compte de manière exhaustive de leurs pratiques et de leur impact sur la société et l’environnement.
Avantage 2 : Facilité pour comparer
La CSRD simplifie la comparaison des performances durables des entreprises en standardisant le reporting ESG. Cela aide les investisseurs et les parties prenantes à évaluer plus facilement les engagements et résultats en matière de durabilité. L’uniformité dans le reporting renforce la cohérence et l’équité dans l’évaluation des entreprises sur les critères ESG, facilitant ainsi la prise de décision pour les investisseurs intéressés par l’intégration de considérations durables dans leurs choix d’investissement.
Avantage 3 : Confiance renforcée
Finalement, la CSRD renforce la confiance des investisseurs et parties prenantes en démontrant l’engagement des entreprises envers la durabilité et la responsabilité. Les normes rigoureuses renforcent la crédibilité des entreprises aux yeux des investisseurs cherchant des critères ESG. Répondant aux attentes croissantes de la société en matière de transparence et responsabilité, elle établit des bases solides pour des relations positives entre entreprises, investisseurs et parties prenantes.
Inconvénient 1 : Coûts liés
La mise en œuvre de la CSRD peut entraîner des coûts importants pour les entreprises, notamment en raison des investissements nécessaires dans la collecte, la vérification et la publication de données conformes aux normes plus strictes. Cette dépense peut être lourde pour les entreprises qui disposent de ressources limitées. Il va falloir trouver un équilibre entre la nécessité de transparence et les charges associées à la conformité.
Inconvénient 2 : Complexité pour les PME
La standardisation des normes peut créer des exigences difficiles à atteindre pour les PME, qui pourraient manquer de ressources dédiées ou de capacités pour se conformer aux nouvelles obligations. Il va être essentiel de mettre en place des processus de soutien pour aider ces entreprises à naviguer à travers ces exigences sans compromettre leur viabilité économique.
Inconvénient 3 : Risque de greenwashing
Un inconvénient potentiel de la CSRD est le risque de greenwashing ! Des entreprises pourraient être tentées de présenter une image plus positive de leurs pratiques ESG qu’elle ne l’est réellement.
Les normes de la directive visent la transparence, mais les entreprises peuvent minimiser leurs impacts négatifs plutôt que de mettre en place des changements réels. Une surveillance sera essentielle pour limiter ce risque et s’assurer que les entreprises respectent les engagements ESG déclarés.
Comment 22EME SIECLE peut vous aider ?
- Vous accompagner dans la familiarisation sur les nouveautés de la directive.
- Réaliser un diagnostic pour anticiper les enjeux et les actions.
- Identifier et mesurer les impacts pour construire votre stratégie durable et votre plan d’action.
- Déployer les actions définies adaptées à votre entreprise.
- Adapter les processus.
- Rédiger et designer le reporting.
- Communiquer sur les actions et les résultats (plan de communication interne et/ou externe).
- Anticiper les évolutions et veiller sur les nouvelles obligations.
La CSRD représente une vraie évolution dans la manière dont les entreprises européennes vont aborder les enjeux de durabilité.
Les avantages sont indéniables, mais il faut garder en tête les défis et prendre le temps de les comprendre.
Cette directive jouera probablement un rôle clé dans la promotion d’une économie plus durable et dans la consolidation de la réputation des entreprises engagées dans la RSE.
Textes de loi
DIRECTIVE (UE) 2022/2464 DU PARLEMENT EUROPÉEN ET DU CONSEIL du 14 décembre 2022 modifiant le règlement (UE) no 537/2014 et les directives 2004/109/CE, 2006/43/CE et 2013/34/UE en ce qui concerne la publication d’informations en matière de durabilité par les entreprises
Annexes :
NORMES EUROPÉENNES D’INFORMATION EN MATIÈRE DE DURABILITÉ (ESRS)
ORDONNANCE N° 2023-1142 DU 6 DÉCEMBRE 2023 relative à la publication et à la certification d’informations en matière de durabilité et aux obligations environnementales, sociales et de gouvernement d’entreprise des sociétés commerciales